L'année dernière, le ministre taïwanais des Affaires Économiques, J. W. Kuo, rappelait l'existence de lois protégeant les technologies de pointe de Taïwan et qui empêchaient donc grosso modo TSMC de déployer ses dernières technologies à l'étranger avant un certain délai. Mais peu de temps après, ce même ministre expliquait que les temps avaient changé, que les anciennes règles ne s'appliquaient plus et que "les entreprises privées devraient prendre leurs propres décisions commerciales sur la base de leurs propres progrès technologiques" et donnait donc son feu vert au 2 nm aux USA. Le gouvernement taïwanais paraissait alors avoir revu sa position au sujet de l'utilisation des technologies de pointe dans des installations à l'étranger.
Mais ça, c'était encore un peu avant que le nouveau président américain fasse son show et que TSMC annonce de nouveaux investissements majeurs aux USA. Face aux incertitudes politiques et économiques, et inquiètes quant à une possible fuite de technologies, les autorités taïwanaises ont finalement décidé de plancher sérieusement sur le sujet en question.
En fin de compte, hormis un règlement de gestions des investissements à l'étranger, il s'avère qu'il n'y avait pas encore de texte législatif obligeant par exemple les entreprises taïwanaises à appliquer un délai entre le déploiement d'une nouvelle technologie à domicile et à l'étranger. En effet, cette approche et son principe du "N+1" (une génération de retard) étaient jusqu'à présent un concept surtout officieux et vaguement formulé, de même que le fameux "Silicon Shield" qui en résulte. Qu'à cela ne tienne, Taïwan veut à présent officialiser ce principe et l'inscrire dans son marbre législatif !
C'est l'article 22 de la loi sur la création industrielle qui va s'en charger. Celui-ci a été adopté en troisième lecture. Il stipule notamment qu'une demande d'investissement à l'étranger pourra être rejetée ou conditionnée si celle-ci remet en cause :
- la sécurité nationale,
- le développement économique du pays,
- le respect des traités internationaux,
- le respect des normes sociales entraînant un litige majeur non résolu
En parallèle, des sanctions financières, encore inexistantes jusqu'à présent, vont également être introduites. Le gouvernement doit encore réviser les règlements pour l'application du nouveau texte. Après quoi, la branche exécutive du gouvernement pourra annoncer la date d'entrée en vigueur. Dans tous les cas, le mise en œuvre devrait se faire d'ici à la fin de l'année en cours. Les autorités ont sans aucun doute l'intention de s'en servir pour s'assurer que TSMC applique bien le principe du "N+1" pour ses investissements aux USA, notamment. Un p'tit coup dur pour les USA, où certains avaient déjà commencé à imaginer que TSMC allait désormais à l'avenir implémenter ses meilleures technologies directement sur le territoire.
Il reste à voir avec quelle rigueur le nouveau règlement sera appliqué. En pratique, l'écart entre la mise en œuvre des technologies à Taïwan et à l'étranger tend en ce moment plutôt à s'allonger que l'inverse, et se situe actuellement entre 2 et 3 ans. On est donc plus proche du N+2, voire du N+3, que d'un N+1. Il est d'ailleurs fort probable que le vrai but du gouvernement de la République de Chine soit d'arriver à faire maintenir précisément ce rythme, sans aucun doute le plus optimal pour son "Silicon Shield", toujours considéré comme sa meilleure assurance contre la République Populaire de Chine. (Source : Computerbase, UDN)
Un Silicon Shield, un vrai !

Attention quand même, N c'est un noeud de gravure et pas une année. Donc si un process arrive 2 ou 3 ans plus tard, c'est pas N+2 ou N+3 mais N+1 ou N+2 en fonction de la production Taïwanaise (à priori un nouveau noeud tous les 2 ans en moyenne)
Il me semble que d'après les plannings déjà établis par TSMC, il y avait déjà ce retard d'au moins 1 noeud de gravure, voire 2 puisque cette année ça sera 2nm à Taïwan et 4 nm aux US. Le 3nm c'est pour 2026 si tout va bien et le 2nm pour 2028. Mais les extensions de la fab 21 seraient déjà prévus pour accueil jusqu'au A16.
Les meilleures technologies continueront d'être déployées aux états-unis, avec simplement le décalage temporel par rapport à Taïwan (ça me parait tout à fait normal et Trump devrait le comprendre lui aussi, c'est les Taïwanais qui développent et optimisent ces processus de fabrication, pas les américains)
Le ministre avait probablement peur que ça arrive en premier aux USA ou en même temps. Mais avec le centre de R&D à Taïwan, la production ne peut commencer que localement.