En octobre 2021, en pleine pandémie, Razer, le fabricant singapourien, connu pour ses périphériques gaming, avait eu une idée de génie pour profiter au mieux d’une mauvaise situation (comme beaucoup) : un masque de protection baptisé Zephyr ! Et pas n’importe quoi comme masque, mais un objet de mode conçu pour les fanatiques de la marque joueurs, aux couleurs habituelles de la marque et intégrant du RGB, en plus des filtres. Tout ça pour 99,99 $ seulement (mais des filtres propriétaires à changer régulièrement et disponibles uniquement chez... Razer) ! Au CES 2022, le fabricant avait montré qu'il était même prêt à aller plus loin avec un Zephyr Pro intégrant une technologie d'amplification de la voix...
Mais ce n’est pas pour l’absence de rapport avec l’informatique ou de pertinence pour le geek moyen d’une telle création que la FTC s’en est prise à Razer. Le cœur du problème, c’est qu’à l’époque, Razer vantait - sur son site, mais aussi via les réseaux sociaux et son PDG - que les filtres du masque étaient de qualité N95 et certifiés pour offrir une efficacité de filtration bactérienne de 99 %, et que son masque était bien meilleure que les alternatives jetables ou en tissu. Tout cela en affirmant en parallèle qu’il n’avait certes pas été testé spécifiquement contre le COVID-19, mais que la filtration bactérienne offrait une protection adéquate.
C’est cette description qui a chiffonné la FTC. En effet, elle a découvert que le Zephyr n’a jamais été testé par l’Institut national pour la sécurité et la santé au travail (NIOSH) ni l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA), et de surcroit que le Zephyr et ses filtres n’ont jamais reçu la certification N95. De plus, la FTC estime que Razer n’a aucune preuve pour son affirmation que la filtration bactérienne à 99 % des filtres sera suffisante pour protéger contre le COVID-19. En effet, le test d’un tiers réalisé quelques mois avant le lancement du Zéphyr avait mis en évidence une efficacité de filtration comprise entre 83,2 et 86,3 %, loin des 95 % minimum requis pour un masque N95. Des résultats dont Razer avait évidemment été informé, mais dont le fabricant n’en avait visiblement eu cure.
En somme, une opération pas très maligne de la part de Razer, surtout en plein milieu d’une pandémie et qui avait conduit la FTC à engagé dès la fin de 2021 des poursuites pour cause de publicité mensongère et désinformation présentant un risque pour la santé publique ! Pour l’anecdote, l’Europe n’était pas restée sans rien faire. Elle a même été plus efficace que la FTC, puisque le masque avait été retiré de la vente en Europe dès le 13 décembre 2021, suivant un nouvel avertissement (le premier avait été envoyé en novembre) par les autorités allemandes qu’une enquête allait être ouverte sur les allégations du Zephyr.
Ce n’était que début 2022 que Razer avait enfin décidé d’enlever toute mention portant sur une filtration N95 du marketing pour le Zephyr. En parallèle, Razer se devait aussi d’informer les piegons la clientèle et offrir des remboursements. Mais la FTC déplore qu’une fraction seulement avait en fin de compte été contactée et que l’option de remboursement avait carrément été omise dans l’email de Razer. Ainsi, moins de 6 % des acheteurs américains auraient été dédommagés à ce jour par Razer. Qu’à cela ne tienne, la FTC propose désormais d’infliger à Razer une amende de 100 000 $, en plus d’une pénalité de 1 071 254,33 $ très exactement, soit le chiffre d’affaires estimé réalisé avec le Zephyr ! Ce montant servirait ensuite à rembourser les consommateurs escroqués...
Bref, longtemps après, Razer subit encore quelques répliques de la pandémie et est rappelé au bon souvenir de cette période particulière, à cause d'une mauvaise "blague" vaguement dystopique qui va finalement lui couter assez cher. Visiblement, le fabricant s'est bien démené pour effacer autant de traces que possible de cette expérimentation. (Source : ArsTechica)
Bien fait pour eux. Dommage que la prune ne soit pas plus élevée