Jusqu’à présent, la production locale de semiconducteur a échappé aux pays du Golfe. Enfin, surtout à l’Arabie Saoudite et aux Émirats Arabes Unis (EAU), deux pays qui auraient les moyens de telles ambitions et les motivations aussi, en fin de compte. Ce rêve existe d'ailleurs déjà et n'est pas récent. Il y a déjà eu des tentatives d’implanter une production domestique par le passé, mais elles n’ont rien donné. L’initiative la plus notable aura été celle de GlobalFoundries, il y a plus de 10 ans, qui n’a néanmoins jamais franchi le cap de brouillon, et ce, malgré le fait que le fondeur soit détenu depuis 2009 par Mubadala Investment Company, un fonds d’investissement d’Abou Dhabi. Ceci n’a donc pas empêché les Émirats en particulier d’être impliqués dans le domaine du semiconducteur, via GlobalFoundries donc, mais aussi OpenAI, qui serait en discussion depuis cette année avec MGX (un autre groupe basé à Abou Dhabi) autour d’un accord de financement potentiel (pour son rêve de réseau mondial d'usines pour l'IA ?). Avec la région au cœur d’une guerre d’influence entre la Chine et les USA (et dans une moindre mesure, la Russie), ce sujet se fait probablement de plus en plus critique.
Une usine dans le désert, ce ne serait pas une première. Ci-dessus, le Fab 21 de TSMC en Arizona.
Avec l’IA en toile de fond, comme le reste du monde, le Golfe aussi veut un rôle plus concret dans la production et l’approvisionnement du semiconducteur avancé. Les motivations peuvent être multiples, mais on imagine que diversification (du pétrole et du tourisme, par exemple), sécurisation d’un approvisionnement essentiel et géopolitique sont également en tête de liste. Les Émirats en particulier ambitionneraient de diversifier leur économie et devenir un acteur majeur de l’IA. L’élaboration d’un écosystème domestique de fabrication de semiconducteur pourrait effectivement y contribuer. Encore une fois, ce sont Samsung et TSMC qui pourraient venir à la rescousse. On peut imaginer que l'un comme l'autre aurait surement à y gagner d’une présence stratégique dans un pays ayant les moyens de ses (grandes) ambitions. Ainsi, des cadres supérieurs de TSMC et de Samsung se seraient tour à tour rendus aux E.A.U pour étudier la possibilité de s’y installer, potentiellement dans le cadre de projets qui pourraient être financés en grande partie par l’État hôte, et accessoirement, avec un rôle central pour Mubadala. TSMC aurait même parlé "d’un complexe d’usines comparable à certaines des installations les plus grandes et les plus avancées de l’entreprise à Taïwan". Une affirmation un peu surprenante, étant donné que le fondeur taïwanais s’est jusqu’à présent toujours gardé de construire dans un autre pays une usine qui marcherait sur les plates-bandes de ses fabs les plus avancées à domicile.
Mais rien n’est encore fait. Les palabres n’auraient que commencé et seraient encore loin d’avoir accouché de plans définitifs. Il y aura de toute évidence de très nombreux obstacles et difficultés à surmonter. Quand bien même les E.A.U jouissent déjà d’un statut de hub technologique pour la région, le pays reste à ce jour encore assez dépourvu de l’industrie et l’infrastructure requises pour la production de semiconducteur et démarrerait donc pratiquement à zéro en la matière. Par conséquent, le chiffre qui circule actuellement pour l’investissement requis est de 100 milliards de dollars, et il s’agit probablement du minimum et ne prenant pas forcément tout en compte. Enfin, si l’argent n’était peut-être pas le premier des problèmes, l’accès à certains outils et technologies pourrait cependant en faire partie. En effet, les USA ont déjà des directives d’exportation en place pour la vente de certaines puces dans la région concernée. N’oublions pas que ce sont les USA aussi qui empêchent la Chine (entre autres) d’accéder aux outils de production les plus récents et les plus avancés. Bref, il est garanti que l’exportation des dernières technologies en matière de semiconducteur et de production de semiconducteur vers les pays comme l’Arabie Saoudite ou les Émirats vont assurément être scrutée de près par l’Oncle Sam. D’autant plus compte tenu de leur attitude parfois un peu ambiguë vis-à-vis des pays adversaires.
Samsung s’est refusé à tout commentaire, tandis que TSMC a dit se concentrer sur ses projets actuels aux USA, au Japon et en Allemagne, mais tout en affirmant rester ouvert aux éventuelles discussions. (Source : Computerbase, WSJ)
La fabrication de semi-conducteurs ne demande pas beaucoup d’eau ?
Ils vont devoir faire des usines de déstalinisation et de traitement des eaux usées supplémentaires pour pouvoir faire fonctionner toute cette industrie.
Pas top pour l’environnement et la consommation d’énergie, mais j’imagine qu’ils s’en fichent un peu là bas.
Vive les usines de déstalinisation!😉
En plus de l'environnement, on peut légitimement se poser des questions sur les conditions de travail.
Pendant ce temps, l'Europe se repose sur le banc de touche du techno-féodalisme, préparant notre sortie de l'histoire du monde...