Parlement Ue Bruxelles

La première régulation de l'IA au niveau mondial est adoptée par le Parlement et approche à grands pas de son adoption définitive.

La proposition de règlementation européenne sur l'intelligence artificielle (retrouvez notre analyse) avait beaucoup avancé au cours des derniers mois et, après avoir enfin trouvé un accord entre les 27 États membres de l'Union , il ne restait plus qu'à ce que les colégislateurs, que sont le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne votent son adoption. Pour le Parlement, c'est désormais chose faite depuis le 13 mars avec 523 voix contre 46 et 49 abstentions.

Qualifié d'historique, ce règlement est la première tentative de régulation de l'IA à un niveau interétatique. Comme souvent, les initiatives européennes pour encadrer les usages technologiques sont suivies de près par le reste du globe et ne manqueront pas d'inspirer les autres États et organisations internationales.

Il s'agit d'allier, d'une, part la protection des citoyens et des entreprises face à des usages de l'IA jugés prédateurs et, d'autre part, d'organiser des règles de concurrence pour que l'Europe soit en mesure d'innover. Un sacré programme !

Le premier alinéa de l'article 1er résume assez bien l'objet de cette norme :

L'objectif du présent règlement est d'améliorer le fonctionnement du marché intérieur et de promouvoir l'adoption de l'intelligence artificielle axée sur le facteur humain et digne de confiance, tout en garantissant un niveau élevé de protection de la santé, de la sécurité et des droits fondamentaux consacrés dans la charte des droits fondamentaux, notamment la démocratie, l'État de droit et la protection de l'environnement, contre les effets néfastes des systèmes d'intelligence artificielle dans l'Union, ainsi que de soutenir l'innovation.

Les juristes spécialistes des libertés fondamentales ne manqueront pas de relever que la Charte des droits de l'Union européenne considère comme fondamentaux le droit au respect de la vie privée, dans son article 7, et la protection des données personnelles, dans son article 8. Le fait qu'ils ne soient pas visés explicitement ici, aux côtés de la démocratie, de l'État de droit et de la protection de l'environnement, alors que l'avènement de l'IA représente pour eux un péril majeur pourrait paraître révélateur.

Le député roumain Dragos Tudorache (Renew, centristes et libéraux), corapporteur de la commission des libertés civiles, a notamment déclaré, lors d'une intervention au sein de l'assemblée plénière : "L'UE a tenu ses promesses. [...] L'IA nous poussera à repenser le contrat social au cœur de nos démocraties, nos modèles éducatifs, nos marchés du travail et la manière dont nous menons les guerres.", avant de rajouter : "La loi sur l'IA est le point de départ d'un nouveau modèle de gouvernance fondé sur la technologie". À chacun d'en penser ce qu'il le veut.

Les propositions initiales comprenaient un grand nombre de protections contre l'usage de l'IA par des entreprises peu scrupuleuses de nos données et contre son usage par les organes répressifs des États, prompts à l'utiliser pour faire de la surveillance biométrique de masse. Il en reste quelques vestiges et certaines protections et garanties sont bien présentes dans le texte adopté, quoiqu'elles aient parfois fait l'objet d'un coup de rabot.

En ce qui concerne les entreprises, la France se rêve en championne de l'IA et aurait tenu à affaiblir considérablement la législation afin que ses licornes, à l'instar de Mistral AI puissent continuer leur croissance et leur innovation, ce qui nécessite de l'entraînement sur une énorme masse de données.

En ce qui concerne la surveillance biométrique de masse, d'après le collectif européen Reclaim Your Face, auquel appartient La Quadrature du Net, la France, toujours, serait à l'origine de l'affaiblissement de ces protections, car elle aurait l'intention d'y recourir largement dès les jeux de Paris 2024.

Pour les lobbyistes du secteur, le texte adopté serait malgré tout susceptible de représenter des freins à l'innovation et au développement des entreprises.

Dans les prochaines semaines, le règlement devrait, sans surprise, être adopté par le Conseil et entrera en vigueur 20 jours après sa publication au Journal Officiel de l'UE.

Parlement Ue Bruxelles

Vaark

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